dimanche 9 janvier 2011

Quand les zelotes du libéralisme ne veulent pas qu’on s’indigne…

J'en connais quelques-uns qui ont très mal fini l'année et qui la commencent encore plus mal.

Ce sont tous ceux qui, depuis quelques semaines, vocifèrent sur toute les radios, sur toutes les chaînes de télévision, dans les journaux, au sujet du dernier livre de Stéphane Hessel : « indignez vous ».

Tous ces chroniqueurs “venus de nulle part, mais présents partout”, qu'on nous présente comme les seuls intellectuels dignes d'intérêt, parlent, au sujet de ce livre, de leçons de morale, ou prétendent que “l'indignation et le premier pas vers l'engagement aveugle”. Ils démontrent à quel point ils méconnaissent totalement ce livre. J'en ai même entendu qui critiquaient Stéphane Hessel, sous-entendant qu'il était un dangereux agitateur, parce qu'il n' expliquait ni pourquoi ni comment il fallait s'indigner.

Et quoi, en sommes nous réduit au point ou nous avons besoin qu'on nous dise comment et pourquoi nous indigner?  Non, c'est vraiment nous prendre pour des idiots que de prétendre une telle chose! C'est vraiment se prendre pour un roi que de croire qu’on a le pouvoir de nous dicter ce que nous devons faire et comment!

Il est certain, que pour bon nombre de ces pseudo d'intellectuels qui ont l'habitude fâcheuse de croire que ce qu'ils disent sur les ondes ou dans les pages des journaux ,est paroles d'Évangile (et qu'en cela nous, lecteurs et auditeurs, devons leur obéir à la lettre), le simple fait que Stéphane Hessel ose, tout simplement, exprimer son opinion et la présenter à ses concitoyens, sans en faire un ordre formel, est quasiment révolutionnaire. J’en ai mêmes lus qui conseillaient : « il faut nous demander de raisonner, non de s'indigner. » !
Comme si le raisonnement constructif pouvait avoir d'autre déclencheur que l'indignation, que la réaction aux choc entre un besoin et ça non satisfaction.

Car ce qu'oublient les” Eric Zemmour, Luc Ferry, Ivan Rioufol, Claude Askolovitch, les causeurs(1) Elisabeth Lévy et Luc Rosenzweig, Philippe Bilger,” c'est le sens exact du mot indignation et de l'acte de s'indigner. Ils oublient que l'indignation est une émotion individuelle et que seul l'action qui peut en résulter peut être collective. Qu'un Luc Ferry, agrégé de philosophie, qui certes utilisa la fonction publique pendant 11 ans, avant d'avoir la révélation que la politique était sa vocation, soit passé à côté de cela en dit long sur son objectivité dans la critique du livre de Stéphane Hessel. Quant aux autres, dans la mesure où ou à longueur d'ondes ils prêchent pour que leurs concitoyens se résignent à leur sort et renoncent à leurs droits, au nom de la mondialisation et de la normalisation libérale, on peut comprendre qu'un livre qui conseille de s'indigner les effraye et leur fasse craindre que les moutons ne deviennent enragés.

Il n’en reste pas moins que s'indigner, en tant que citoyen, et en tant que personne, est une preuve d'excellente santé démocratique, républicaine et personnelle.

En effet, si la résignation se définit par la soumission à son sort, par le fait de renoncer à un droit, à un besoin, l'indignation se définit comme l'expression d'une colère provoquée le plus souvent par l’injustice ou par un manquement à des valeurs morales. L'indignation traduit une insatisfaction de l'individu. Elle provoque le plus souvent de la colère envers ce qui fait obstacle à nos valeurs ou à notre sens de la justice.
En psychologie, on estime que la colère qui a des intensités différentes pouvant aller du simple mécontentement à la profonde fureur, doit donc pas être canalisé mais s'exprimer. Car si elle est trop longtemps ou trop fréquemment contenue, elle va provoquer un sentiment d'impuissance à se soustraire aux situations non désirées, qui aboutira à la rage destructrice ou à la révolte.
La colère est un signal pour l'individu car elle lui signifie que, dans un aspect de sa vie, l'équilibre est rompu. Elle est donc un message d'insatisfaction d'un besoin et le marqueur d'un obstacle qui nous empêche d'avancer. Face à la colère, l'individu, de par son éducation, peut avoir honte des émotions et des réactions physiologiques qu'elle engendre. Malgré cela, force est de constater que si il réussit à contrôler ces réactions physiologiques, son esprit reste concentré sur le problème, sur l'obstacle rencontré.
Et cette mobilisation de l'esprit est un formidable levier pour l'évolution personnelle. Car cette mobilisation de l'esprit prépare à l'attaque. Bien comprise, elle va permettre à l'individu de se défendre, de conquérir ce qui lui apportera la satisfaction qu'il désire. La colère fournit l'énergie pour vaincre l'obstacle qui se dresse devant nous. Si on apprend très jeune  à ne pas agir impulsivement mais à comprendre les fondements de sa colère, comment et combien on est affecté par une injustice, un obstacle, une atteinte à nos valeurs, la colère peut être très bonne conseillère et permette de trouver une façon d'agir qui permettra de mieux atteindre son objectif de satisfaction.

L'indignation étant l'expression d'une colère, elle peut être le déclencheur d'action raisonnées et réfléchies qui permettront à ceux qui osent s'indigner de ne plus attendre que ce soient les autres qui règlent leurs problèmes, ou de ne plus les laisser leur en créer, et donc de mener une vie plus équilibrée sur le plan psychique et sur le plan social.

Vous comprenez certainement mieux pourquoi, je pense que ceux qui mènent actuellement une campagne de dénigrement contre le livre de Stéphane Hessel, voient un colossal danger dans son conseil « indignez vous ! ». Quand on constate qu'en plus Stéphane Hessel nous demande de prendre la défense du programme du Conseil National de la Résistance, le message , pour des libéraux qui veulent démanteler l'ensemble des mesures qui constituent sa deuxième partie, Stéphane Hessel ne peut être perçu que comme un grand subversif mettant en danger la doctrine libérale et ses leviers préférés que sont la soumission à l'autorité, à la propagande diffusée par les médias, aux valeurs de l'argent et du marché.

Certes, nos “élites” intellectuelles et/ou “zélotes libéraux”, “venues de nulle part mais présentes partout”, n'expriment pas leur peur de façon aussi crue. Habituées à occuper le vide sidéral des médias, en déblatérant le plus grand nombre de mots à la seconde afin de noyer le poisson, leurs attaques essayent de prendre un aspect culturel, plus raisonné.

Mais qui cela peut-il encore tromper? Lorsqu'on les écoute attentivement leurs arguments sont creux, non étayées et n'arrivent pas à masquer leur dépit et la peur  que l'indignation, « suggérée » par un homme qui n'a pas eu peur de courir le risque de sacrifier sa vie pour libérer son pays, pourrait engendrer comme le réveil des consciences dans cette population qu'ils essayent d'endormir à longueur de journée.

Il n'en demeure pas moins que bon nombre des valeurs que porte Stéphane Hessel, font partie du “patrimoine commun de valeurs” du plus grand nombre des français, jeunes et vieux, de souche ou immigrés!

Il n'en demeure pas moins que ces valeurs sont inscrites dans la Constitution de la République Française et qu'elle font partie de notre identité culturelle et morale.

Ce n'est pas parce qu'un nombre infime de parvenus, actuellement aux pouvoirs, veut  les jeter aux orties que nous devons subir leur diktat sans nous en indigner.


Pour compléter le livre de Stéphane Hessel, écoutez A.Camus: l'art et la révolte ne mourront qu'avec le dernier homme

Sources: Youtube; Rue89; Microcassandre, Wikisource; Guide des émotions; Programme du Conseil national de la Résistance

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