samedi 23 octobre 2010

Philippe Courroye, la manœuvre fatale

Il est manifeste, lorsqu'on lit l'interview accordée par le procureur Générale de Versailles au JDD, qu'en s'attaquant une nouvelle fois à la juge Isabelle Prévost-Desprez, afin d'obtenir son dessaisissement du volet de l'affaire Bettencourt sur lequel elle enquête, le procureur Courroye vient de perdre la mainmise absolue qu'il avait réussi à garder dans l'affaire Woerth- Bettencourt. Visiblement, le procureur général de Versailles, en a assez de l'image déplorable de Justice survoltée et tendancieuse, que le procureur donne à sa juridiction.

Croyant probablement qu'une fois de plus, sa hiérarchie, impressionnée par ses relations haut placées, allait encore passer l'éponge sur ses « frasques » et ses animosités personnelles, Philippe Courroye, en accusant une juge indépendante d'avoir trahi le secret professionnel, n'a réussi qu'une chose, c'est qu'enfin la Cour de Cassation va être saisie et va décider si l'ensemble des dossiers constituant l'affaire Woerth- Bettencourt doit être confié à une autre juridiction et peut-être à un juge d'instruction.

Philippe Ingall-Montagnier, le procureur général de Versailles, supérieur hiérarchique du procureur Courroye, a en effet exprimé le souhait que tous les dossiers concernant l'affaire Woerth- Bettencourt quittent Nanterre. Pour ce faire il va saisir la chambre criminelle de la Cour de Cassation, présidée par Bertrand Louvel, à fin qu'elle se prononce sur un éventuel dessaisissement de l'ensemble des dossiers concernant cette affaire.

Ce qui veut clairement dire que, si la Cour de Cassation le décide, Philippe Courroye perdra la main sur les enquêtes préliminaires.

Adieu veaux, vaches, cochons, plus moyen d'étouffer l'affaire ou d'obtenir une promo. Plus moyen d'être sollicité par les médias ( ce qui flatte tout de même bien l'égo et permet de se faire connaître)...

Mais revenons sur les accusations portées par Philippe Courroye.

Il accuse la juge Prévost-Desprez, qui est chargée d'un supplément d'information dans le volet "abus de faiblesse" de l'affaire Bettencourt, de violation du secret professionnel en fournissant des informations à deux journalistes du journal Le Monde.

Il faut reconnaître que pour un monsieur qui participe à des dîners tropéziens avec Jacques Chirac et sa femme (alors que l'ancien président de la République est visé dans une enquête menée par la cour de Nanterre), soupçonner une juge indépendante de trahir le secret professionnel, c'est très osé !

Sans compter que le même procureur n'hésite pas à convier à sa table des représentants du groupe Casino et le fonctionnaire de police parisien en charge de l'enquête sur la société de supermarchés et le « pot aux roses » ( ou le pot au feu, j'ignore ce qu'il y avait ce jour là au menu) découvert, il s'indigne, dans tous les médias, qu'on puisse le suspecter de trahir le secret professionnel !

Je ne reviendrai pas sur le fait que le même procureur est nommément cité dans les écoutes de l'affaire Woerth-Bettencourt comme un contact de l'avocat de Liliane Bettencourt, qu'il informe des mois auparavant, des décisions qu'il va prendre concernant la plainte de sa fille !

Et que dire du classement sans suite, par le dit procureur, d'une plainte visant un appartement du président à Neuilly?

On pourrait également s'interroger sur l'étrange similitude de timing entre la demande d'enquête de Philippe Courroye sur une juge qui manifestement avance beaucoup trop dans ses enquête, et le refus injustifié, et quelque peu insultant envers la justice, de Liliane Bettencourt à se présenter à une convocation de la juge!

Et pourtant, malgré tout ces faits qui pourrait faire peser de lourds soupçons de violation du secret professionnel ( si ce n'est plus!) , sur le juge Courroye, aucune information judiciaire n'a été ouverte. C'est donc, que ni le juge Courroye, ni la juge Prévost-Desprez ne peuvent se voir reprocher leurs relations extra- professionnelles....ou téléphoniques.

Et la manœuvre de Philippe Courroye visant à faire dessaisir la magistrate indépendante paraît être le signe d'une mauvaise foi doublé d'arrogance et de « foutage de gueule » caractérisés. En plus cela traduit la peur du procureur de voir son travail examiné par un second magistrat, peut être moins attaché aux mis en cause dans l'affaire Woerth-Bettencourt....

Alors certes, le procureur général va demander au procureur de Versailles d’ouvrir une information judiciaire. pour y voir clair dans l'accusation de « violation du secret professionnel ».

Mais c''est désormais la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation de Paris qui va prendre en main la destinée de l'affaire Woerth- Bettencourt. Un effet que le juge Courroye n'avait probablement pas envisagé. Croyant affaiblir celle qu'il croit être une adversaire, il vient de faire la manœuvre de trop, la manœuvre fatale!

Espérons que le président de la chambre criminelle saura prendre des décisions qui satisferont non pas le pouvoir, mais les principes de sérénité et d'indépendance, indispensables au bon fonctionnement de la justice.

Pour en savoir plus :

- texte de la "loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques" .

- Le secret Professionnel dans la Fonction Publique

Sources: Le JDD;Le Monde ; Les Echos Judiciaires; L'Express; Le Figaro; Marianne2;

1 commentaire:

  1. Pour une fois que l'actualité va dans le bon sens !! On va enfin voir le Procureur Courroye se désaisir de l'affaire. (Ce qui était un non sens total en vu de ses contacts avec les principaux accusés.)

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