samedi 9 octobre 2010

Grève et manifestation du 12 octobre, allez y décomplexés !

Je le disais dans un précédent article, tactiquement, le gouvernement espérait que sa réforme des retraites « passerait » auprès de l'opinion publique comme une réforme courageuse, nécessaire, suffisante et justifiée par l'allongement de la durée de vie.

De fait, en présentant ainsi sa réforme, il comptait s'appuyer sur le levier de la résignation des salariés pour la faire passer. Il s'attendait certainement à un mouvement social sporadique , et réduit dans le temps, de certains salariés et il devait secrètement espérer que le mouvement s'essoufflerait très vite. Par contre ce à quoi il ne s'attendait pas, c'est à l'ampleur, à la diversité et à la durée de ce mouvement.

Il ne s'attendait pas non plus à la puissante force de contre argumentation qui a été développée dans les médias, et en particulier sur Internet.

Contre argumentation qui a implacablement démonté, un à un, tous les arguments du gouvernement, notamment celui de l'allongement de la durée de vie, en passant par celui de la pérennité financière de cette réforme et de cet illogisme qui consiste à faire travailler plus longtemps des personnes vieillissantes, dont les employeurs ne veulent plus, en laissant au chômage de jeunes adultes que le marché du travail ne veut pas. L'injustice profonde de cette réforme a été démontrée, ainsi que son objectif final : introduire la retraite par capitalisation.

Une des conséquences inattendues , pour le gouvernement, de cette forte contre argumentation est, de toute évidence que l'opinion publique, interrogée au travers de sondages, reste majoritairement opposés à cette réforme.

Autre conséquence, et non des moindres, la contestation contre cette réforme n'est plus corporatiste mais s'étend à l'ensemble de la population, toutes classes d'âge, toutes classes sociales, confondues. Ainsi, les lycéens et les étudiants, qui ne participaient pas aux 2 premières manifestations du mois de septembre, ont décidé de se joindre à celle qui aura lieu mardi 12 octobre.

La forme elle-même du mouvement est en train de changer. De simples manifestations unitaires, elle évolue aujourd'hui vers des mouvements de grève reconductible. Le mouvement se durcit considérablement. Il passe d'un mouvement qui pouvait être interprété et présenté comme de la résistance au changement , par méconnaissance ou peur de perdre des acquis, à un mouvement de blocage de l'appareil de production. Qui plus est, ce mouvement est soutenu, encore aujourd'hui, par 71 % de la population.

Or, à quelques semaines de la présidence annuelle du G20 par la France, cela tombe on ne peut plus mal.

Non seulement par ce que cela ternit, soit disant, l'image de l'économie française aux yeux des investisseurs, mais par ce que cela induit aussi que les Français n'acceptent pas les règles du jeu de la mondialisation et les sacrifices personnels actuels et à venir qu'elle leur impose. En ce sens, la mobilisation des plus jeunes Français contre cette réforme est doublement significative de ce refus.

Bien évidement ce que le gouvernement craint le plus aujourd'hui c’est une généralisation des grèves et l'amplification du mouvement social. Il va tout faire pour que nous nous résignons et que le mouvement s’essouffle! À la détermination des Français, à leur volonté de faire valoir un droit constitutionnel de ne pas consacrer leur vie entière à la production de biens et services, de bénéficier d'une solidarité nationale par le biais des retraites par répartition, le gouvernement va proposer ce qu'il fait de plus efficace depuis trois ans : agiter la peur et diviser pour mieux régner.

La manœuvre a déjà commencé.

On assiste, en effet, depuis hier matin, à une multiplication de déclarations des « officiels de la majorité » visant à faire croire à l'inéluctabilité du vote de cette réforme, à faire peur, à faire semblant d'être outré de la manipulation des jeunes, par des adultes irresponsables, Etc...

Le premier « boulet » a été tiré par le «père de la réforme des retraites», Raymond Soubie, hier matin, sur RTL. Dans un premier temps le conseiller social du président a jugé «totalement irresponsable que des adultes en situation de responsabilité dans certaines organisations invitent les lycéens à aller dans la rue pour le sujet des retraites». Au passage, notez le mépris de cet homme pour la capacité de réflexion des plus jeunes d'entre nous, lorsqu'il prétend que seuls les salariés actuels ont à se préoccuper légitimement du problème des retraites. Deuxième attaque, l'inéluctabilité puisque le monsieur affirme que la réforme devrait être votée avant la fin du mois d'octobre.

Deuxième boulet, l'annonce, après le vote de l'article 5 par le Sénat, du porte-parole de l'UMP, Frédéric Lefebvre, que la loi sur les retraites est "maintenant sauvées" ...alors qu'il reste encore 29 articles à voter!

"Après l'Assemblée Nationale, le Sénat vient d'adopter le coeur de la réforme des retraites: le report progressif de l'âge de la retraite à 62 ans. Les retraites sont maintenant sauvées!".

Comme le souligne le journal Le Parisien, «  Formellement cette disposition sera réputée définitivement adoptée une fois l'ensemble du texte voté par les deux assemblées. » Et s'ajoute à cela, les faits qu'une deuxième lecture pourrait être demandée par le gouvernement, et que le conseil constitutionnel pourrait être saisi !

À quoi peut donc servir Une telle annonce si ce n'est à faire croire que rien, désormais, ne pourra empêcher cette loi d'être mis en œuvre? Or Nous venons de le voir c’est entièrement faux, rien n'est voté définitivement.

Dernier boulet, visant probablement à générer de la peur chez les parents d'élèves, alors que vendredi, les lycéens ont manifesté pour la deuxième journée consécutive contre la réforme des retraites. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, s'exprimait sur France Info, et s'est fendu d'une pseudo évidence :

"manifester sur la voie publique est dangereux". Dangereux? On voit que le monsieur n'a pas du manifester souvent en dehors des cabinets feutrés de l’oligarchie ….

Nul doute que d'ici mardi prochain, jour de la quatrième manifestation massive contre cette réforme, Les communicants de la majorité gouvernementale vont nous abreuver de toute une série de petites phrases, d'éléments de langage, qui n'auront pour but que de culpabiliser les grévistes, de les soumettre à la vindicte des «Bons français otages des grévistes », de stigmatiser les syndicats qui ne veulent pas rester assis sur le couvercle de la marmite sociale, etc.,  etc.

Tout ceci serait du plus haut comique s'il ne s'agissait, finalement, que de soumettre un peuple aux diktats de terroristes financiers.

Alors non, en exerçant votre droit constitutionnel de grève, vous ne prenez personne en otage ! Bien au contraire, C'est exactement le bon moment, compte tenu des enjeux pour Nicolas Sarkozy de sa présidence du G20, d'utiliser sans faiblir, sans complexes, les droits dont disposent les salariés, dans ce rapport de forces que nous a imposé le gouvernement.

Ceux qui prennent en otage les autres, ce sont ceux qui veulent, au prétexte de compétitivité internationale, faire en sorte que les chômeurs, jeunes ou vieux, acceptent de travailler avec des salaires aussi dévalorisés que ceux versés aux salariés des pays du tiers-monde !

Ceux qui prennent les autres en otage, ce sont ceux qui courbent le dos, se soumettent, se résignent et veulent que tout le monde fasse comme eux !

Ceux qui prennent les autres en otage, ce sont ceux qui, pour leur profit immédiat, voudrait que vous sacrifiez votre avenir et celui de vos enfants et que ces derniers leur confient les clés de leur avenir !

À l'allure ou va la casse sociale dans notre pays, si vous ne faites rien pour vous battre, le 12, le 16 octobre, et les jours qui suivront, plus rien ne vous sera garanti par la suite! Vous aurez vous même ouvert la porte de votre esclavage!

Souvenez vous ou renseignez vous....il fut un temps....

« Ami, entends-tu ces cris sourds du pays qu'on enchaîne ?

Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines ? »

 

Sources: Libération; Le Parisien ; France Info, La Toupie; Solidaires; Yann Olivier; Youtube

§§§

Nota : je me refuse à cette actuelle coquetterie de langage qui consiste à parler de contre-réforme des retraites. Car à bien y regarder il s'agit bel et bien d'une réforme qui consiste à passer insidieusement du système de répartition au système de capitalisation pour financer les retraites. Or, réformer c'est faire passer d'un état à un autre, c'est opérer des modifications significatives. Passer de la répartition à la capitalisation c'est bel et bien une modification significative de notre système de retraite.

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