jeudi 21 octobre 2010

"CE N'EST PAS ÇA LA DÉMOCRATIE"

Il eût été étonnant qu'en presque 2 mois de mouvement social, de manifestations, de grèves tournantes, nous n’ entendions pas parler un jour ou l'autre de « prise otages ». Je m'attendais à ce que ce soit, au cours d'une interview d'usagers des transports en commun, dont les télévisions privées et publiques sont friandes. Ou bien que ce soit au détour d'un commentaire militant, sur un site de médias en ligne.

Mais non, preuve que ce mouvement social est massivement soutenu par la population française, y compris les salariés non-grévistes, c'est le président de la république qui a été obligée de s'y coller !

Participant à une table ronde sur la ruralité, à Bonneval, en Eure-et-Loir, jeudi 21 octobre, il a estimé :

« on n'a pas le droit de prendre en otage des gens qui n'y sont pour rien, dans leur vie quotidienne »

En prononçant cette phrase, qui a dû parler très fort au cœur des électeurs de l'UMP encore encartées au parti présidentiel, le président de la république sous-entend qu'il y a tout de même des gens qui y sont pour quelque chose... Et que dans ce cas, on aurait le droit de les prendre en otage! Si Nicolas Sarkozy a des noms, qu'il n'hésite surtout pas à nous les donner...nan je rigole !

Toujours dans la surenchère démagogique sur le sujet, Nicolas Sarkozy a insisté:

« on ne peut pas être le seul pays au monde où, quand il y a une réforme, une minorité veut bloquer les autres. Ce n'est pas possible, ce n'est pas ça la démocratie ».

Allons bon, voilà que maintenant Nicolas Sarkozy s'intéresse à la démocratie …

  • Lui qui a, dès les premiers mois de son quinquennat, dépossédé le peuple français de son vote référendaire sur le traité européen,
  • Lui qui n'a pas hésité à contraindre le vote des députés et à faire revoter la loi hadopi
  • Lui dont le conseiller, qui ne détient aucun mandat électif, s'est permis hier d'annoncer qu'il demanderait au Sénat d'accélérer le processus de délibération sur le projet de réforme des retraites.
  • Lui qui n'a pas hésité, jeudi après-midi, au Sénat, à obliger Gérard Larcher, président de cette assemblée, à se renier,
  • Lui qui a forcé le Sénat à un vote unique sur une partie des articles additionnels du projet de loi de réforme, précisément tous ceux qui touchent au financement de la réforme des retraites. Multirécidiviste puisque, toujours sur les lois budgétaires et procédures de vote unique a été utilisé, depuis le début de son quinquennat, une fois en 2007- 2008,2 fois en 2008 -2009, est 2 fois en 2009 -2010 !

Non, M. Sarkozy, messieurs de l'UMP,du Nouveau centre et du Modem, votre définition de la démocratie n'est pas celle du peuple français, et il est en train, très précisément, de vous le dire depuis le début du mois de septembre !

Dans une démocratie, dois-je le rappeler, le pouvoir s'exerce par le peuple, pour le peuple et sous son contrôle!

La démocratie, son processus de décision, ne se gère pas comme on gère une chaîne de production dans une usine, à coups de cadences infernales qu'on vérifie , chronomètre en main, comme semble le faire Éric Woerth “grand comptable du temps de parole des parlementaires! .

En démocratie, les décideurs sont les citoyens, ou ceux qui ont reçu mandat de décider à leur place. Ils ne se musellent pas comme des subordonnés, en haussant le ton et en limitant leur temps de parole.

La démocratie c'est avant tout l'acceptation que les parlementaires, dont le pouvoir législatif n'est pas inféodé au pouvoir exécutif, prennent tout le temps nécessaire pour construire, débattre, et voter en leur âme et conscience, des lois qui régiront la vie des 64 millions de Français dont ils sont les représentants. C'est donc laisser s'exprimer les élus du peuple, qui lui ne peut le faire au quotidien, mais seulement tous les 5 ans.

En démocratie, les débats parlementaires ne sont pas les vulgaires réunions d'entreprises et ne peuvent être l'objet d'une gestion du temps de parole non plus que d'une gestion des contenus abordés. Tout simplement parce que la France n'est pas une entreprise !

La démocratie ça n'est pas de piétiner tous les contre-pouvoirs les uns après les autres, sous prétexte de réforme et de rentabilité. La démocratie ça n'est pas considérer qu'on est le seul légitimé par une élection, mais bien de prendre en compte que les députés eux aussi sont les représentants légitimes du peuple français et qu'à ce titre eux aussi ont le droit de prendre la parole, quand bien même elle exprime des idées et une conception de la France et de sa gouvernance différente de la vôtre.

La démocratie ça n'est pas, non plus, un système où l'on favorise le népotisme et le seul intérêt de ceux qui financent vos vacances ou vos campagnes électorales. La démocratie rejette spontanément et fermement le lobbyisme, les privilèges, le corporatisme. Et quand elle s'exerce au sein d'un république dont la devise est « Liberté, Egalité, Fraternité », il ne devrait pas être nécessaire au peuple de la rappeler à ses dirigeants, comme nous sommes obligés de le faire depuis septembre 2010!

Dans une démocratie respectable et qui se respecte, les citoyens ne sont pas juste bons à subir en silence les décisions de l'exécutif. Leur droit à la parole, voir même à l'insurrection, lorsque leurs droits sont bafoués par l'exécutif, est un devoir constitutionnel. Et ce ne sont pas les intérêts économiques de quelques actionnaires influents et lobbyistes qui peuvent permettre à l'exécutif de transgresser les règles démocratiques.

Alors, pour leur gouverne, j'ai le plaisir d'annoncer que votre tentative de diviser l'union syndicale a lamentablement échoué, comme tout ce que vous entreprenez (sauf enrichir vos proches et vos amis).

Fort du soutien sans cesse croissant de l'opinion publique, l'ensemble des organisations syndicales, y compris la confédération générale des cadres, a annoncé qu'elle appelait à 2 nouvelles journées de manifestations les 28 octobre et 6 novembre.

  • Une première journée aura lieu le 28 octobre, au moment de l'harmonisation par la commission mixte paritaire et texte voté par les sénateurs et les députés .
  • La seconde journée aura lieu le 6 novembre, juste avant la promulgation de la loi.

Sources: Le Point; Le Monde; Le Figaro;

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