En soi, l'annonce d'un remaniement prochain, reporté de semaine en semaine depuis le mois de juin, ne représente que très peu d'intérêt pour les citoyens lambda. Il représente peut-être davantage pour les médias et les journalistes de cours politiques qui ont obligation de connaître parfaitement les méandres des ministères, à fin de bénéficier de sources « bien informées ». Il représente surtout beaucoup pour ceux qui vont être les victimes ou les bénéficiaires de ce remaniement dont les effets va se manifester par une diminution ou une augmentation de leurs ressources mensuelles, si ce n'est une descente ou une montée d'orgueil.
Néanmoins, même si pour nous tel ministre n'est qu'une marionnette choisie dans une boîte et qu'un remaniement ne consiste qu'à changer la boîte dans laquelle on choisit la marionnette, il a été très clair, depuis le mois de juin, qu'une certaine impatience régnait dans le microcosme politique et médiatique qui voyait probablement dans ce non-événement une façon de polariser l'attention des citoyens et de la détourner de leurs préoccupations réelles, en particulier celle de la réforme des retraites.
Finalement, la surexcitation des uns et des autres va probablement se calmer avec l'annonce du remaniement qui permettra également de masquer la vacuité du G20.
Pour que ce remaniement « se vende » bien, le Président de la République et ses conseillers avaient à résoudre ce qui s'apparente à la quadrature du cercle.
Très déconfit par l'accueil glacial que les électeurs centristes ont fait au « virage à l'extrême droite » pris ces derniers mois, il y avait obligation de redonner au prochain gouvernement une image plus modérée, afin de ramener au bercail les moutons égarés.
Carrément lapidée, sur le plan social, par la mise au vote à la hussarde de la réforme des retraites, il était nécessaire, pour l'équipe dirigeante, de faire très vite disparaître ce que l'opinion publique identifiait comme les responsables de cette réforme.
Totalement déconsidéré par l'acharnement d'un Parquet incapable de faire preuve de son indépendance et d'interpréter à la lettre les textes constitutionnels, le chef de l'Etat se devait de donner un signe fort que tel n'était pas le cas, sous peine d'être accusé de ne pas respecter la séparation des pouvoirs déjà amplement bafouée au Parlement.
Cependant, pour continuer à mener à bien son projet libéral de casse du secteur public gestion rigoureuse des Finances Publiques, allant de l'Education Nationale, aux Budget, en passant par la Santé et la Sécurité Publique, il y a absolue nécessité de garder un quarteron d'hommes et de femmes dont l'idéologie, et la soumission idolâtre à Nicolas Sarkozy, garantissent une obéissance totale.
Qui plus est, dans la cuisine interne des jeux de pouvoirs, à moins d'un an et demi les prochaines élections présidentielles, au sein du parti présidentiel, Nicolas Sarkozy et ses conseillers se devaient de neutraliser non seulement les individus tentés par une candidature à ces élections, mais également de mettre à la tête du parti présidentiel des hommes ou des femmes de confiance.
C'est donc, Claude Guéant, homme de confiance si il en est, qui est le “Grand Ordonnateur” de ce remaniement. 3 postes clé doivent être tenus par des hommes ou femmes de confiance: Celui de ministre de l'Intérieur, celui de ministre de la Justice et le poste de Premier Ministre.
Il fut longtemps question d'une ouverture « sociale » en nommant à la tête du gouvernement Jean-Louis Borloo. Mais outre le fait qu'il ne présente pas la souplesse d'échine nécessaire pour supporter qu'un conseiller présidentiel lui dicte ses ordres, portons à son crédit qu'il semble avoir, tout de même, une once de volonté de faire passer ses propres idées politiques et celle de son parti. Qui plus est, s'il présente comme avantage de rallier à la cause présidentielle l'électorat centriste, il présente aussi le danger de faire fuir l'électorat frontiste, conquis sur le dos des Roms et des immigrés. Comme en plus, il a très peu de chances d'être un concurrent sérieux de Nicolas Sarkozy aux prochaines élections présidentielles, il ne représente que très peu d'intérêt immédiat.
Par contre, François Fillon, premier ministre depuis l'élection de Nicolas Sarkozy en 2007, présente le double avantage d'être parfaitement d'accord pour s'effacer en tant que premier ministre « régnant » au profit de Claude Guéant. L'électorat centriste semble l'apprécier. Mais si l'on en croit les derniers sondages, il représente un danger, si il lui vient à l'idée de se présenter à l'élection présidentielle de 2012. C'est pourquoi, il me semble qu'il sera reconduit comme premier ministre du prochain gouvernement, et cela jusqu'au terme du mandat présidentiel, histoire de l'occuper pour qu'il ne se laisse pas tenter par une candidature.
Claude Guéant ayant fait une grande partie de sa carrière au Ministère de l'Intérieur pourrait en prendre la tête. Valérie Pécresse pourrait , en tant qu'ex enseignante en droit constitutionnel, succéder à MAM à la tête du ministère de la justice, rajeunissant quelque peu l'image d'un ministère qui est, depuis 2007, “traditionnellement” dirigé par une femme.
Les trois postes clé étant tenus par des fidèles, il est donc fort prévisible que le prochain gouvernement soit constitué par moitié de membres du parti présidentiel dont, pourquoi pas, un maire du Sud Ouest qui avait promis lors des dernière élections municipales qu'ils ne se consacrerait plus qu'à son mandat municipal et de « nouvelles têtes » choisies parmi ceux qui jusqu'à présent n'ont été récompensés d'aucun ministère ou secrétariat d'État. Il ne resterait alors, à Nicolas Sakozy, qu'à renouveler « son stock » d'hommes « de gauche » tolérant à sa politique libérale et, s'il ne choisit pas un centriste comme chef de gouvernement, a distribuer largement les portefeuilles de ministre ou les secrétariats d'Etat, à des leaders centristes, à fin de ne pas trop les mécontenter.
Pour ce qui concerne l'UMP, il serait fort dangereux de mettre le concurrent direct et déclaré de Nicolas Sarkozy, à savoir Jean-François Copé, à sa tête et surtout sans garde-fou. C'est pourquoi seul un très proche et très fidèle de Nicolas Sarkozy devrait remplacer Xavier Bertrand, si ce dernier est appelé au gouvernement ( Dieu nous préserve!).
Vu sous cet angle, un remaniement n’est tout au plus qu'une distribution des prix pour services rendus au chef de clan et éventuelle tentative de faire croire qu'on change...
Mais avec un chef de gouvernement inchangé, peut-on encore croire que, parce qu'on change la boite dans laquelle on prend les marionnettes, elles n’en demeurent pas moins des marionnettes?
Sources: Bakchich; Le NouvelObs; Le Monde; Le Figaro; Le Point; Désirsd'avenir; Les Mots ont un sens; Le Parisien
La suppression du juge d'instruction au profit d'un parquet soumis au politique semble de plus en plus inenvisageable au regard de plusieurs décisions de justice récentes.
RépondreSupprimerhttp://www.slate.fr/story/30109/parquet-justice-contestations